Mademoiselle Gabrielle Mélard

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Domiciliée à Anderlecht (1070, Belgique)
Née à Saint-Josse-ten-Noode (1210, Belgique) le samedi 31 juillet 1909
Décédée à Anderlecht (1070, Belgique) le jeudi 25 juin 2020 à l'âge de 110 ans

Album de vie 

Cet album de vie a été crée le dimanche 28 juin 2020.
La dernière modification date du mercredi 1 juillet 2020.

Notre Tante Gaby a toujours vécu pour les autres

Gaby lors de la fête de ses 108 ans

Le 2 juillet 2020
Merci Monsieur le Vicaire Jean-Marie Kambale.
Née en 1909, Mademoiselle Gabrielle Mélard a connu les deux premières guerres mondiales, la première comme enfant à Liège, la seconde comme élève-infirmière, soignant les blessés en 1940 et a échappé à celle du Covid-19. Notre tante Gaby a toujours vécu pour les autres.
Sa mère était chapelière et a vécu notamment à Ixelles et à Schaerbeek. Son père, qu’elle a peu connu, était antiquaire. Pendant la Première Guerre mondiale, elle a vécu à Liège chez sa tante et son oncle. Elle se souvenait même avoir été passée par la fenêtre près de la place Dailly dans un train bondé quittant Bruxelles.
Elle a arrêté ses études en 1923 à l’âge de 14 ans pour commencer des cours de sténodactylographie et de comptabilité. Elle a travaillé comme employée chez Mouillet, un marchand de vis et de boulons, entre 1925 et 1938. A l’âge de 29 ans elle a commencé des études d'infirmière à Sainte-Julienne à Bois-de-Breux et est devenue infirmière sociale en 1942. Elle a soigné des blessés français lors de la bataille de Hannut en mai 1940, notamment le capitaine Bouvier et le lieutenant El Kebir d’Algérie, d’après son compte-rendu.
Bref retour à Bruxelles dans le quartier des Marolles comme infirmière sociale pour les organisations patronales du Brabant. En avril 1944, elle est retournée à Liège dans les usines de zinc de la Vieille-Montagne à Alleur jusqu’en 1948. Elle est alors engagée comme enseignante dans son école d’infirmières Ste-Julienne qui a déménagé au Beauregard, rue Saint-Gilles. Elle y est restée 26 ans jusqu’en 1974, date où elle a pris sa retraite. Le bâtiment a été partiellement détruit pour les besoins de HEC Liège. Pour se déplacer elle utilisait une Fiat 500 et ensuite une DKV.
Parmi ses loisirs, notons de très nombreux voyages, seule ou avec des amies, en Suisse dès 1947, Autriche, Italie (au moins 8 fois), France (au moins 11 fois), Espagne, Grèce. Des musées, églises, monuments mais aussi des marches dans la nature. Pas de plage. Souvent en train, parfois en voiture. Elle logeait fréquemment dans des institutions religieuses. Cela me donne l’occasion d’insister sur la religion catholique qu’elle pratiquait avec enthousiasme. Elle filmait les fleurs avec sa caméra, prenait des photos et surtout rédigeait des notes. C’est ainsi que j’ai retrouvé parmi d’autres un texte de 124 pages dactylographiées sur mon père, ma mère et notre famille. Et une photo de moi à 6 ans avec elle devant la Faculté de l’Université libre de Bruxelles où j’ai été professeur.
Entretemps, elle a hérité de la grande maison de sa tante et de son oncle sur les hauteurs de Bressoux mais a fini par prendre un appartement au centre de Liège. Elle gérait intensément l’association des anciennes de son école avec quelques camarades infirmières dont son amie Gisèle Bailly, décédée depuis. Elle s’occupait aussi beaucoup de sa famille qu’elle visitait régulièrement et écrivait presque chaque jour à son frère Raymond, mon père. Jusqu’en 1996, lors de la longue maladie de celui-ci, elle a aidé sa belle-sœur, ma mère. En 2002, à plus de nonante ans, elle prenait encore le train et le bus pour venir visiter sa belle-sœur. Jamais elle n’oubliait les fêtes, les anniversaires et les virements associés.
En 2004, elle a décidé d’entrer dans une maison de repos et a choisi la résidence Parc des Princes à Auderghem pour être près de sa famille. Elle a apprécié que la directrice Mme Plevoets vienne lui rendre visite à Liège pour choisir les meubles à emporter au home.
Jusqu’en 2007, elle préparait ses programmes télé, effectuait ses paiements (par virement) et contrôlait ses comptes. Elle a courageusement supporté le décès de ma mère en 2009 et a participé à la messe de funérailles. Presque tous les ans depuis 2009, l’année de son centenaire, la maison de repos et la commune d’Auderghem organisaient une fête en son honneur avec un message du Palais. J’en ai filmé plusieurs. En 2015, elle a été hospitalisée 3 semaines suite à une pneumonie. Les médecins pensaient que c’était fini mais elle s’en est remise, grâce au personnel soignant de la Résidence.
En octobre 2019, la résidence Parc des Princes à Auderghem a dû fermer et elle a suivi le personnel dans la nouvelle résidence Alegria à Anderlecht. Un peu endormie, elle a participé à la fête des 4 centenaires de l’institution qui a eu l’honneur de la télévision avec la participation du Bourgmestre Eric Thomas et de l’échevine Fabienne Miroir.
Je voudrais reprendre ici les paroles de Philippe Vanderbemden, professeur à l’Université de Liège, et neveu de son amie Gisèle Bailly : « Je me souviendrai de la gentillesse de Gaby, de ses talents d'organisatrice, de sa capacité à s'intéresser à des tas de choses et à continuer à apprendre comme si la vie n'avait pas de fin. Je la revois encore dans son appartement rue du Méry m'expliquer un dossier documentaire qu'elle tapait à la machine en y collant des photos d'acariens. Je ne connais absolument personne qui a gardé un tel dynamisme et une soif de connaissance aussi longtemps dans la vie. »
Mais elle n’avait pas seulement faim et soif que de science. Elle aimait bien manger et boire du vin. En 2018, la Dernière Heure a rapporté les paroles d’une infirmière de la maison "Elle nous dit très souvent qu’elle a faim. Et comme, généralement, cela n’arrive pas assez vite à son goût, elle nous dit qu’elle a le temps de mourir avant d’être servie !". Elle menaçait aussi de ne pas payer sa facture si elle ne recevait pas sa soupe.
A part cela, ma tante Mademoiselle Gabrielle Mélard, qui insistait beaucoup sur ce Mademoiselle, ne se plaignait pas car sa santé le lui permettait.
Elle savait ce qu’elle voulait. Nous savons ce qu’elle valait. Merci beaucoup Tante Gaby.